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  • Photo du rédacteurJuliette Demanet

Fille De Choix #11

Dernière mise à jour : 10 déc. 2021

Elisabeth Debourse: mordre dans le sexisme


Prenez une plume infatiguable, une curiosité sans bornes, un travail acharné, vous obtiendrez l’un des esprits les plus vifs de notre petit pays. Journaliste musicale d’abord, Elisabeth Debourse est aujourd’hui devenue l’incontournable si l’on veut parler société, manger et aussi féminisme. Du podcast Salade Tout (saison #1 co-réalisée avec Axelle Minne) à sa newsletter hebdomadaire Mordant, il y a encore bien plus que ces deux excellentes raisons de suivre son travail. Luik est très fier de vous transmettre sa playlist 100% féminine et le texte qui l’accompagne:


LA PLAYLIST ICI, Le texte là ↓

Elles s’appellent Taiwo et Kehinde Lijadu, les Lijadu Sisters. Le duo funk opère entre les années 60 et 80 à l’avant de la scène nigériane, à quelques encablures génétiques et musicale de Fela Kuti, leur cousin éloigné. Elles sont un écho d’Idaban, la troisième plus grande ville du pays, leur timbre de jumelles se superposant à la perfection. En novembre dernier, Kehinde est décédée d’un cancer, rompant le lien de vie, mais aussi politique qui les unissait. « La musique nous a appris à tendre la main et à tenter de changer les choses, socialement, moralement, financièrement, spirituellement et politiquement. Nous chantions ces morceaux parce qu’ils [les politiques] n’écoutaient pas. Nous avions besoin d’écoles, nous avions besoin de routes, nous avions besoin d’eau potable », évoquaient-elles en 2014 à Harlem au micro de la journaliste et DJ Kate Hutchinson. Pour faire entendre leur voix et celles de leur pays, il leur a fallu prendre une place qu’on n’attendait pas d’elles, dans un milieu qui ne voulait pas d’elle. Malgré l’héritage et le cran que Taiwo et Kehinde Lijadu ont laissé dans les mémoires, le rappeur Nas n’a pas jugé utile de les créditer quand il a samplé « Life’s Gone Down Low » en 2006. Elles s’appellent Afshana Khan et Razia Sultan, et ce sont leur voix qui me prennent en otage chaque fois que j’écoute « Chala Vahi Des », le deuxième morceau de cette playlist — pas la guitare de Jonny Greenwood, tapie quelque part derrière les percussions et les vagues de l’harmonium. Il faut pourtant creuser la surface des crédits de l’album Junun pour trouver leur nom, quand celui du membre de Radiohead figure partout. Leur invisibilisation pourrait être rapidement balayée par des arguments de notoriété, d’investissement ou de paternité du projet, mais même avec ceux-ci, l’anecdote est un rappel crispant de la réalité musicale dans laquelle nous vivons : bien sûr que les femmes (f/x) sont là, bien sûr qu’elles chantent, qu’elles jouent. Mais pour faire la lumière sur elles et leurs talents, il faut écarter les hommes comme on le ferait dans une foule aux centaines de visages énormes et semblables. Elle s’appelle Nubya Garcia et a le menton haut, quand elle traverse Londres ou joue de son saxophone. Un instrument avec lequel elle fait corps, elle fait bouche, quand quelques décennies plus tôt sa pratique aurait été jugée vulgaire pour une femme, trop connotée, sale, alors qu’elle en aurait sorti les mêmes longues et puissante litanies. Nubya Garcia joue libre, mieux, elle leade des batteurs, des pianistes, des trompettistes, collabore avec Moses Boyd, Theon Cross et Shabaka Hutchings d’égale à égal. Iel s’appelle Kae Tempest, a sorti trois albums, cinq recueils de poésie, trois pièces de théâtre et un roman. Elle s’appelle Colleen, Cécile Schott de son vrai nom, était professeure jusqu’en 2006 et compose aujourd’hui des boucles superbes à base de viole de gambe, épinette, clarinette, wind chimes, calimba, piano à pouce, accordéon ou encore harmonicon. Elle s’appelle Arlo Parks, une poétesse chantant si justement sa « super sad generation » qu’elle a ravi le cœur des critiques musicaux·les de la BBC dans le classement Sound of 2020, à seulement 20 ans. Elles s’appellent Mélissa Laveaux, Fatima, Charlotte Adigéry, Scarlett O’Hanna, Anika, Yazz Ahmed, Lianne La Havas et sont les artistes qui portent ma colère et mon espoir, celui qu’on ne dérobe plus aux musicien·nes femmes, trans, non-binaires, racisé·es leur chance de créer, de performer et d’être reconnu·e·s. Elisabeth Debourse

ARTISTES

Colleen, Lidaju Sisters, Afshana Khan, Razia Sultan, Tshegue, Sampa The Great, Sophia Kennedy, Ivy Sole, Greentea Peng, Arlo Parks, Fatima, Apani B., Zara McFarlane, Nubya Garcia, Yazz Ahmed, Emma-Jean Thackray, Ashley Henry, The Blessed Madonna, Charlotte Adigéry, Sophie Hunger, Anika, Peter Kernel, Michelle Gurevich, Khruangbin, Mattiel, Hannah Williams & the Affirmations, Y La Bamba, mélissa laveaux, Girlpool, Haley Heynderickx, Scarlett O’Hanna, Lianne La Havas, Joy Wellboy, SoKo, Kae Tempest

Piqûre de rappel sur le concept ‘Fille De Choix’

Tous les mois, une nouvelle curatrice sélectionne une playlist 100% féminine/non binaire. Pour qu’elles existent, pour qu’on les découvre, pour se battre contre le sexisme et l’invisibilisation des femmes dans la musique.

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